R. franc. Sociol, VI, 1965, 215-227

Les femmes dans les grands ensembles

Approche psychologique de cas d'agrément et d'intolérance

par Michèle Huguet

L'étude des phénomènes psychologiques ou sociaux liés aux grands ensembles urbains retient depuis plusieurs années non seulement l'attention des chercheurs, mais aussi celle du grand public. Parmi les problèmes les plus fréquemment invoqués, l'adaptation des femmes à ce nouveau mode d'habitat fait l'objet de discussions nombreuses. Nous nous proposons ici d'examiner, grâce à l'analyse d'études de cas réalisées dans la population féminine habitant les grands ensembles urbains, les manifestations de tolérance ou d'intolérance à la situation qui s'y rencontrent. Le sujet donne lieu, en dehors des publications scientifiques proprement dites, à une floraison d'articles allant de la presse quotidienne aux revues de vulgarisation. On y lit par exemple : « Grands ensembles, ennui des femmes > (1) , « Psychiatres et sociologues dénoncent la folie des grands ensembles» (2), «Apprendre à s'en sortir... certaines mères de famille retournent à l'école pour ne plus être angoissées » (3) , « Madame Bovary dans les H.L.M. » (4) . Dans le contenu même de ces articles, dont l'analyse fait l'objet d'une autre partie de notre travail, des assertions," souvent appuyées de pourcentages, tendent à brosser un tableau du grand ensemble tel qu'il apparaît constituer un environnement insolite pour l'homme, créateur de maux psychologiques et sociaux. Ainsi, à propos du bruit, on avance : « 52 % des troubles nerveux proviennent de l'excès de bruit dans les grandes villes » (5) . Par ailleurs les femmes s'ennuient, font des dépressions nerveuses, se suicident parce qu'elles sont

215